SOMMAIRE LETTRE EAU N°66
Actualité
04. L’analyse de la récupération des coûts
ou le cycle économique de l’eau
06. Lorsque l’arbre et l’eau se marient : plongée au coeur des ripisylves
Dossier : Adour-Garonne : la capture de l’eau
08. Les poissons migrateurs en Adour-Garonne : patrimoine en péril
10. Les ressources en eau : vers une gestion quantitative territoriale ?
11. Barrages et réservoirs du bassin Adour-Garonne
12. Retour sur une crue exceptionnelle
14. Agr’eau : programme de développement de la couverture végétale pérenne des sols en Adour-
Garonne
Point de vue
16. Agriculture, eau et changement climatique en Adour-Garonne
Edito Bernard Rousseau
La conférence environnementale de septembre 2013 a produit la feuille de route de l’action
gouvernementale pour une politique de l’eau. Ce texte, qui n’a rien de réglementaire, ne laisse pas transparaître de grandes ambitions. L’édito de la dernière Lettre eau (1) reprenait succinctement les
points marquants de ce document, et posait cette question : « en quoi la feuille de route peut-elle
rectifier les tendances lourdes de la société française » ?
Question qui reste d’actualité puisque la politique de l’eau, tout en étant fortement structurée par les directives européennes, est prise en otage par les autres politiques économiques, notamment celle qui concerne l’agriculture industrielle. Parallèlement à cette conférence, le processus initié par la Directive Cadre sur l’Eau a continué à orienter la politique de l’eau : exécution des programmes des agences de l’eau, mise en oeuvre des SDAGE 2009-2015 et des programmes de mesures, le tout sanctionné par un nouvel « état des lieux » en 2013.
L’état des lieux 2013 est un élément important de la politique de l’eau, comparé à celui de 2004, il permet de mesurer les résultats obtenus (2). Par exemple : les objectifs de la directive ERU (3) sont-ils atteints ? Les pollutions diffuses ont-elles régressé ? Abandonnons-nous moins de captages d’eau potable que précédemment ? Y a t-il plus d’eau dans les rivières en été ? Les diverses populations de poissons sont-elles en cours de rétablissement ? Les migrateurs migrent-ils plus facilement ? L’état des masses d’eau s’est-il amélioré ? Les pêcheurs à la ligne et les pêcheurs professionnels en eau douce, indicateurs de l’état des milieux, sont-ils plus nombreux ?
Toutes questions légitimes à poser, pour qui cherche à évaluer l’efficacité des politiques suivies, et
donc des outils mis en oeuvre. A l’exception des résultats intéressants obtenus pour la directive ERU, pratiquement tous les autres indicateurs ne montrent pas d’avancées. Dans les six bassins hydrographiques, on constate au mieux une stagnation de l’état des eaux.
Pour expliquer cette situation, on pourrait considérer que les investissements réalisés, bien qu’importants, n’ont pas été suffisants au regard de l’ampleur des problèmes à résoudre. Certes, mais il
ne faudrait pas que la « capacité à payer » soit le paravent derrière lequel se cachent les mauvais payeurs.
D’autres causes expliquent cette stagnation. Dispose-t-on toujours des solutions techniques permettant
de résoudre les problèmes identifiés ? Pour traiter les eaux usées, c’est oui. Pour la reconquête de la continuité des rivières, cela dépend des riverains qu’il faut convaincre, et des structures qu’il faut créer. Quant à réduire les pollutions diffuses agricoles, grandes causes de la non atteinte du bon état des eaux, le défi est immense. Il faudrait que la profession agricole accepte de relever ce défi, alors que l’on constate en écoutant ses représentants qu’elle ne veut rien entendre, tout en se faisant entendre ... au sommet de l’Etat !
Pendant ces dernières années, la lutte de la FNSEA (4) contre les services de police de l’eau de l’ONEMA
a atteint son maximum. Dans une lettre (5) la FNSEA encourage « à poursuivre la mobilisation sur le terrain ». Vieille tradition du syndicalisme agricole, le scénario des attaques est bien huilé : mobiliser quelques centaines d’excités, faire venir une cinquantaine de tracteurs (6), « saloper » l’espace public avec des déjections animales, brûler pneus et paille, dégrader les locaux et le matériel administratif,
intimider les fonctionnaires de police, voire plus (7).
Et ce scénario s’est répété : juillet 2010 au service départemental de la Creuse, le 30 janvier 2013 dans l’Indre, le 18 septembre 2013 contre le Parc naturel du Morvan, le 30 septembre 2013 à Saint Pourçain sur Sioule dans l’Allier, suivi par les manifestations de décembre 2013 à Troyes devant la DDT (8) ... avec un manifestant de choix, administrateur de l’ONEMA.
Confrontés à la description de ces évènements les responsables agricoles concernés minimisent l’ampleur des dégradations mais, à l’ère de la vidéo pour tous, leur crédibilité ne résiste pas bien longtemps lorsqu’elle est confrontée aux images chocs des téléphones portables. Reste la question, en quoi la feuille de route peut-elle rectifier les tendances lourdes de la société française ? En rien, puisqu’elle ne prévoit rien, et qu’en plus, comme le dénoncent les syndicats de l’ONEMA : « L’Etat désavoue ses fonctionnaires».
gouvernementale pour une politique de l’eau. Ce texte, qui n’a rien de réglementaire, ne laisse pas transparaître de grandes ambitions. L’édito de la dernière Lettre eau (1) reprenait succinctement les
points marquants de ce document, et posait cette question : « en quoi la feuille de route peut-elle
rectifier les tendances lourdes de la société française » ?
Question qui reste d’actualité puisque la politique de l’eau, tout en étant fortement structurée par les directives européennes, est prise en otage par les autres politiques économiques, notamment celle qui concerne l’agriculture industrielle. Parallèlement à cette conférence, le processus initié par la Directive Cadre sur l’Eau a continué à orienter la politique de l’eau : exécution des programmes des agences de l’eau, mise en oeuvre des SDAGE 2009-2015 et des programmes de mesures, le tout sanctionné par un nouvel « état des lieux » en 2013.
L’état des lieux 2013 est un élément important de la politique de l’eau, comparé à celui de 2004, il permet de mesurer les résultats obtenus (2). Par exemple : les objectifs de la directive ERU (3) sont-ils atteints ? Les pollutions diffuses ont-elles régressé ? Abandonnons-nous moins de captages d’eau potable que précédemment ? Y a t-il plus d’eau dans les rivières en été ? Les diverses populations de poissons sont-elles en cours de rétablissement ? Les migrateurs migrent-ils plus facilement ? L’état des masses d’eau s’est-il amélioré ? Les pêcheurs à la ligne et les pêcheurs professionnels en eau douce, indicateurs de l’état des milieux, sont-ils plus nombreux ?
Toutes questions légitimes à poser, pour qui cherche à évaluer l’efficacité des politiques suivies, et
donc des outils mis en oeuvre. A l’exception des résultats intéressants obtenus pour la directive ERU, pratiquement tous les autres indicateurs ne montrent pas d’avancées. Dans les six bassins hydrographiques, on constate au mieux une stagnation de l’état des eaux.
Pour expliquer cette situation, on pourrait considérer que les investissements réalisés, bien qu’importants, n’ont pas été suffisants au regard de l’ampleur des problèmes à résoudre. Certes, mais il
ne faudrait pas que la « capacité à payer » soit le paravent derrière lequel se cachent les mauvais payeurs.
D’autres causes expliquent cette stagnation. Dispose-t-on toujours des solutions techniques permettant
de résoudre les problèmes identifiés ? Pour traiter les eaux usées, c’est oui. Pour la reconquête de la continuité des rivières, cela dépend des riverains qu’il faut convaincre, et des structures qu’il faut créer. Quant à réduire les pollutions diffuses agricoles, grandes causes de la non atteinte du bon état des eaux, le défi est immense. Il faudrait que la profession agricole accepte de relever ce défi, alors que l’on constate en écoutant ses représentants qu’elle ne veut rien entendre, tout en se faisant entendre ... au sommet de l’Etat !
Pendant ces dernières années, la lutte de la FNSEA (4) contre les services de police de l’eau de l’ONEMA
a atteint son maximum. Dans une lettre (5) la FNSEA encourage « à poursuivre la mobilisation sur le terrain ». Vieille tradition du syndicalisme agricole, le scénario des attaques est bien huilé : mobiliser quelques centaines d’excités, faire venir une cinquantaine de tracteurs (6), « saloper » l’espace public avec des déjections animales, brûler pneus et paille, dégrader les locaux et le matériel administratif,
intimider les fonctionnaires de police, voire plus (7).
Et ce scénario s’est répété : juillet 2010 au service départemental de la Creuse, le 30 janvier 2013 dans l’Indre, le 18 septembre 2013 contre le Parc naturel du Morvan, le 30 septembre 2013 à Saint Pourçain sur Sioule dans l’Allier, suivi par les manifestations de décembre 2013 à Troyes devant la DDT (8) ... avec un manifestant de choix, administrateur de l’ONEMA.
Confrontés à la description de ces évènements les responsables agricoles concernés minimisent l’ampleur des dégradations mais, à l’ère de la vidéo pour tous, leur crédibilité ne résiste pas bien longtemps lorsqu’elle est confrontée aux images chocs des téléphones portables. Reste la question, en quoi la feuille de route peut-elle rectifier les tendances lourdes de la société française ? En rien, puisqu’elle ne prévoit rien, et qu’en plus, comme le dénoncent les syndicats de l’ONEMA : « L’Etat désavoue ses fonctionnaires».