Assise au soleil, dans son jardin des bords de Loire, Florence Denier-Pasquier a le sourire. Elle revient tout juste d'un week-end du réseau juridique. "On a discuté jusqu'au milieu de la nuit. C'était un moment fort en amitié." Une ou deux fois par an, la soixantaine de bénévoles, des avocats, des juristes professionnels, se retrouve pour deux jours. Florence Denier-Pasquier les connaît depuis 2000. A 42 ans, elle fait partie des " anciennes " du réseau juridique. A son tour, elle transmet son expérience."On s'entraide, on se conseille sur les affaires en cours."
Ses premiers pas dans le mouvement FNE remontent à 1998. Elle frappe à la porte de la Sauvegarde de l'Anjou, à Angers, et fait la connaissance Jacques Zeimert, alors président de l'association. "Il m'a formée. ça a été une rencontre très importante. C'est la culture associative, on noue des relations humaines de qualité." Elle n'est pas là par hasard : Florence Denier-Pasquier est convaincue que nous pouvons convertir nos modes de vie et vivre davantage en harmonie avec la nature. Ce nouvel engagement associatif résonne d'ailleurs avec un engagement spirituel plus ancien, "sur les pas de François d'Assise, saint patron des écologistes, pour qui la nature est compagne d'humanité".
Dans la douce cité angevine, les décideurs locaux vont découvrir sa pugnacité. A son arrivée dans l'association, dont elle est aujourd'hui vice-présidente, la jeune femme se plonge dans l'épais dossier d'implantation d'une usine de traitement d'eau potable en zone inondable, dans le lit de la Loire. La juriste est bien armée : diplôme de Sciences Po Grenoble, DESS en droit de l'environnement et trois années de thèse sur le droit de l'eau. Première victoire : Dominique Voynet, alors ministre de l'écologie, demande au préfet de revoir son arbitrage.
Energie, patience et méthode
Pendant dix ans, cette femme combative porte la voix de son association dans de nombreuses commissions locales, comme le Conseil de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques ou le Conseil de développement de l'agglomération d'Angers. Sa persévérance paie.
"Sur des dossiers ouverts il y a douze ans, on a fait évoluer les perceptions. Au début des années 2000, on parlait seulement de trafic automobile. Désormais, le prix du pétrole, le climat ou la dimension sociale des déplacements urbains entrent dans le débat." Aujourd'hui, elle savoure l'annonce par les élus de l'abandon du projet de liaison sud d'Angers, fruit d'une longue mobilisation associative, qui a demandé de l'énergie, de la patience et de la méthode.
Si Florence Denier-Pasquier connaît le droit sur le bout des doigts, elle emploie l'action contentieuse à bon escient. "Agir en justice, c'est un des outils pour créer un rapport de forces. Il permet de faire entendre les alternatives portées par les associations." Elle croit avant tout à l'évolution des mentalités. Une philosophie qu'elle applique aussi dans son activité professionnelle. Son expertise lui permet de former ceux qui mettent en œuvre les politiques publiques environnementales, dans des écoles d'ingénieurs ou des collectivités territoriales, abordant par exemple avec des techniciens de rivières la restauration écologique des cours d'eau. En parallèle, cette spécialiste du droit de l'eau participe à des publications techniques sur les méandres de cette matière complexe pour un éditeur juridique.
Très impliquée au niveau local, elle découvre désormais les rapports de force "plus feutrés" au niveau national. Elle s'investit en 2011 contre la réforme " urbanisme de projet ", qui s'annonçait désastreuse. Avec d'autres organisations environnementales, FNE parvient à en faire retirer les mesures les plus nuisibles pour l'environnement. Depuis 2010, Florence Denier-Pasquier siège au Conseil économique, social et environnemental, au sein du groupe environnement et nature. Une "reconnaissance importante de l'expertise associative" pour cette mère de trois enfants, âgés de 7 à 17 ans, qui jongle, comme tant d'autres femmes, entre sa vie familiale, son activité professionnelle et l'engagement militant. Elle vit cette nouvelle étape avec enthousiasme. "On retrouve au sein de la fédération des personnes aux parcours très différents. On s'engage pour des motifs variés. Mais nous sommes réunis autour de certaines valeurs, comme l'indépendance vis-à vis du pouvoir politique et la liberté. C'est très puissant !"
B. de Badereau
Florence Denier-Pasquier en 5 dates
20 février 1970 Naissance à Nantes
1998 Bénévole à La Sauvegarde de l'Anjou, fédération FNE du Maine-et-Loire
Depuis 1999 Formatrice indépendante en politiques publiques environnementales
2007 Membre du directoire du réseau juridique de FNE
2010 Représentante au Conseil économique, social et environnemental